L'enquête

Les explications de Philippe l'avait rassurée, ainsi que ses douces paroles de réconfort.

-Oui, ça va mieux. C'est vrai qu'une fois stabilisé, si ce n'était des hublots, on ne verrait la différence!

Elle rit nerveusement. Le reste du voyage se passa sans anicroches. Philippe et Méridith avaient discuté longuement, de tout, et de rien, avaient rit, à gorges déployées, et même partager une certaine mélancolie... à un moment, lorsqu'il fut question de leurs parents respectifs.

Au bout de plusieurs heures, qu'ils ne virent pas passer, ils atterirent enfin à Montréal. Le trajet jusqu'à la maison de Méridith n'avait pas été trop long. La nuit, le trafic était plutôt tranquil!

Arrivée rue Gouin Est, le taxis s'immobilisa devant une magnifique petite maison de pierre de style Français datait du 18e siècle. Méridith prit son «sac magique» et invita Philippe à monter les 4 marches de bois qui menait sur le perron qu'elle avait fait construire peu de temps après avoir déménagé dans la maison de sa grand-mère, après le décès de celle-ci.

-Et voilà! dit-elle, heureuse d'être enfin chez elle, c'est mon petit chez moi!

Ils entrèrent et constatèrent que l'endroit sentait un peu l'humidité. Cela faisait plusieurs années qu'elle n'était pas revenu. Elle avait chargé une voisine de venir, une fois de temps en temps vérifier les lieux, aiérer, faire suivre son courrier. Mais, depuis qu'elle était allée à Londres, elle n'était pas revenu à Montréal.

-Garde ton manteau, je pense que ça va prendre quelques temps avant que la maison soit réchauffée comme du monde! lança-t-elle en riant, une petite buée blanche sortant de sa bouche.

Ah... les hivers québécois... Rapidement, elle prit une lampe de poche, pour aller dans la cave et remettre le courant. Elle pu enfin allumer les lumière. En remontant retrouver Philippe, elle eut la surprise de sa vie!

-Mais qu'est-ce que... hurla-t-elle avant de mettre une main devant sa bouche.

Sa maison était sans dessus dessous. Et pour une fois, ce ne pouvait être l'oeuvre de son Jean-Jules. Il était resté à Londres...

À peine le taxi s'était-il immobilisé devant la maison de Méridith, Philippe fut tout de suite impressioné par la beauté de la maison. Il aimait bien le cachet antique de celle-ci. Lorsque Méridith descendit au sous-sol, il l'attendit, seul, au rez-de-chaussée, le temps qu'elle active le circuit électrique. Aussitôt les lumières allumées, il resta bouche bée en voyant l'état des lieux. Méridith n'était pas à ce point désordonnée! Quelqu'un était venu.

-Tu crois que c'est en lien avec notre enquête? Ça semble assez réscent...

Il firent quelques pas dans le salon. La première chose qui leur sauta aux yeux c'était la bibliothèque renversée.

-À première vue, est-ce qu'il te manque quelque chose?

Méridith tourna sur elle-même pour constater les dégâts.

-Non... à première vue, il ne manque rien.

Elle soupira bruyamment. Elle qui avait si hâte de retrouver la maison de sa grand-mère... SA maison. Quelqu'un s'était permis d'entrer dans son intimitée. Mais qui? Et surtout pourquoi? Elle n'avait presque plus de lien avec les gens du Québec. Pourquoi cette intrusion n'a-t-elle pas été perpétré dans son appartement de Londres? Son passé revenait-il la hanter?

-Belle observation Philippe, en effet, ça semble ressent. Dans le cas contraire, ma voisine m'aurait avertie! Et tu sais quoi, la personne qui est venue cherchait quelque chose de précis. Les dégâts sont concentrés dans le salon, la bibliothèque et mon bureau. On pourrait conclure qu'il cherchait des documents. Mais je vois tellement pas lesquels! Je ne garde aucun documents important ici! Les dossiers d'enquête ne quittent jamais le bureau des Aurors...

Elle se mordit la lèvre tout en réfléchissant. Était-ce en lien avec l'enquête qu'elle menait avec Philippe? C'était peu probable... mais pas impossible.

-Qui était au courant qu'on venait ici? De mon côté, je n'ai averti que mon patron et deux de mes collègues qui sont aussi des amis proches. Mais tout ce monde-là n'a aucun lien avec Montréal. Je n'ai averti personne que je rentrais... Et toi? t'as averti quelqu'un?

Elle releva la tête et dévisagea Philippe.

-Non... dis-moi pas que t'as averti ton oncle?! T'as pas fait ça? Dis-moi que tu as pas fait ça!

- Mon oncle ?! Non, je n'ai pas communiqué avec lui, ni même avec ma mère ou mon frère. Philippe ne comprenait pas.

- La seule personne que j'ai contacté, c'est ma grand-mère, pour l'avertir de notre visite et je ne crois pas qu'elle ait put faire tout ce grabuge.

Méridith pouffa de rire malgré elle.

-Non, bien sûr... elle n'aurait pas fait tout ce grabuge!

Au moins, le principal intéressé n'avait pas été averti de leur visite, ce qui leur permettrait de concerver un certain effet de surprise lorsque Méridith irait l'intérroger. Ce qui était primordial à ses yeux. Est-ce que la grand-mère de Philippe aurait pu avertir son fils de sa venue? C'était possible... Surtout qu'il n'était pas exclu qu'elle soit en lien avec toute cette histoire. Elle ne pouvait pas ne pas être au courant du statut de sorcier de Marius; c'était son fils. Qu'elle l'accepte ou non, elle était au courant, c'était une certitude. comme le sont tous les parents d'enfants sorciers. Ce qui la met en position d'en savoir pas mal plus que ce que Philippe pourrait le croire. Mais cela, Méridith décida de le garder pour elle. Il n'avait pas besoin de cette information pour le moment. Le fait était que la grand-mère de Philippe était un témoin important dans cette histoire...

Méridith se laissa tomber dans un sofa qui avait été recouvert d'un drap blanc tout juste avant de quitter le Québec.

-C'est à n'y rien comprendre... marmona-t-elle pour elle-même. Même si ta grand-mère était au courant de notre venue, comment aurait-elle pu savoir qui j'étais. Est-ce que tu m'as nommée? Lui as-tu dis que tu ne venais pas seul?

C'est alors qu'elle entendit une planche du plafond craquer au dessus d'eux. Elle leva les yeux et attrapa sa baguette.

-T'as entendu ça? demanda-t-elle à Philippe qui, de toute évidence n'avait pas pu ne pas l'entendre. Le voleur, il est encore ici...

Dans un geste lent, elle dit signe à Philippe de se mettre à l'abri derrière le sofa. Elle monta les marches, une à une, sachant par coeur où mettre ses pieds pour ne pas faire craquer le grand escalier qui gémissait normalement sous le poids de ses quelques 150 ans. À peine eut-elle atteint le pallier qu'elle fit face à une masse noire et trappue. Celle-ci se précipita vers Méridith, la bousculant au passage, avant de foncer vers la fenêtre de la lucarne avant pour la défoncer et passer au travers. L'on entendit le bruit sourd d'une chute amortie par la neige abondante qui s'était accumulée le long du mur extérieur de la maison.

-Stupefix! hurla Méridith une seconde trop tard.

L'ombre s'était échapée. Elle accouru vers la fenêtre et tenta d'identifier l'inconnu. Elle voulut lancer un sort d'immobilisation, mais au même moment, une vieille dame qui sortait son chien s'approchait. Méridith ne pouvait faire usage de magie devant des moldus! Elle jura entre ses dents. C'est alors qu'elle entendit le son caractéristique d'un transplanage. Son voleur s'en était tiré... mais il ne perdrait rien pour attendre!

Rapidement, elle retourna vers Philippe.

-Tu as pu voir quelque chose? Je pense que c'était un homme... Une chose est certaine: c'est un sorcier!

Philippe mentionna à Méridith qu'il avait annoncé sa venue à sa grand-mère et qu'il allait être accompagné d'une amie, mais sans lui dire le nom de Méridith.

Philippe entendit un bruit à l'étage. Méridith aussi l'avait entendu et à sa demande, il se cacha derrière le sofa. Alors qu'elle montait silencieusement l'escalier, Philippe se munit nerveusement d'un parapluie qui gisait par terre.

Une série de bruit retentit soudainement à l'étage et le fracas d'une vitre ce fit entendre. Le calme revint et Méridith retrouva Philippe inquiet.

-Est-ce que ça va ? Tu n'es pas blessé ? questionna Philippe toujours agrippé au parapluie. Il senti un rire étouffé de Méridith qui voyait sans doute le ridicule de cette arme. Puis il vit les yeux de Méridith se river sur ce fameux parapluie.

- Je ne l'ai pas brisé, j't'le jure, assura-t-il, alors qu'il vit se que Méridith fixait.

-Non, non, je ne suis pas blessée. Juste une fenêtre de cassée. dit-elle pour rassurer Philippe. Un petit sort de blocage fera l'affaire pour empêcher l'air de rentrer jusqu'à ce que je puisse la réparer.

Elle s'aperçut ensuite qu'il tenait un parapluie et étouffa un rire. Croyait-il réellement pouvoir se battre contre un sorcier avec un parapluie?!

-Je te crois, répondit-elle en riant après que Philippe lui eut assuré qu'il ne l'avait pas brisé.

La maison de Méridith commençait à se réchauffer tranquilement. Elle put enlerver son manteau. Elle voulut le déposer sur la paterre dans l'entrée, mais remarqua qu'il était étendu de tout son long, ainsi que toutes les choses qu'il devait suporter. Elle lança son manteau sur l'un des sofas.

-Ouais... je pense que j'ai un petit ménage à faire moi... souffla-t-elle, découragée. Si tu veux dormir, ajouta-t-elle à l'intention de Philippe, j'ai une chambre d'ami à l'étage, le voyage a été long. Moi je me sens pas fatiguée. J'ai réussi à dormir dans l'avion et avec tout ce qui vient de se passer, j'arriverai pas à fermer l'oeil de toute façon. Je vais commencer à ranger.

Elle se dirigea vers la bibliothèque et commença à remettre les livres à leur places.

- Je t'avoue qu'après ce qui vient de se produire, je n'ai pas trop envie de me coucher tout de suite. Laisse moi t'aider pour le ménage, à deux on ira plus vide.

Pendant que Méridith rangait les livres, Philippe s'occupait de l'entrée. Il remit sur pied la paterre et y accrocha les manteaux, foulards et chapeaux qui avaient été renversés.

- Tu ranges ton parapluie à quel endroit Méridith ? questionna Philippe en le secouant fermement pour l'assèche. Quelque chose le chicotait, comment ce pouvait-il que se parapluie soit trempé alors qu'ils venaient à peine d'entrer dans la maison et que malgré la bruine qui enveloppait l'air à leur arrivée, Philippe n'avait pas vu Méridith utiliser un parapluie.

Il n'y avait qu'une possibilité pour Philippe, ce parapluie appartenait au sorcier qui venait de fuir.

-C'est très gentils à toi de m'aider Philippe. Quand on est deux, ça va deux fois mieux, mais quand on est tout seul... ça va tout seul fois mieux! lança-t-elle en riant, faisant allusion à la petite comptine que tous les enfants québécois connaissaient.

Une fois qu'elle eut terminé de ranger la bibliothèque, elle se dirigea vers le meuble télé pour y ranger les magasines et journaux. Elle aurait pu, avec un sort assez simple, tout ranger rapidement, mais elle voulait le faire elle-même, question de bien passer en revue toutes ses choses pour être certaine qu'il ne lui manquait rien. Puis elle se retourna pour indiquer à Philippe où il devait ranger le parapluie.

-Oh... mets-le dans le porte-parapluie juste là, dit-elle en pointant le menton vers la porte d'entrée.

C'est alors qu'elle le vit. Son parapluie à elle était toujours bien en place dans le porte-parapluie. Elle regarda Philippe secouer le parapluie qui était encore humide et un déclic se fit dans sa tête.

-Hé! Ce n'est pas à moi ça... tu crois que...

Elle se dirigea vers Philippe pour pouvoir mieux regarder l'objet. En chemin, elle marcha sur un cadre dont le verre se brisa. Elle n'y fit pas attention. Ce qui l'intéressait, c'était de retrouver un indice sur le parapluie.

Elle le prit des mains de Philippe et l'examina attentivement. À première vue, il ressemblait à n'importe quel parapluie. À part le pomeau en forme de bec de canard, rien dans sa constitution ne pouvait laisser un quelconque indice. Il n'y avait aucune trace de magie ou de mauvais sort... Mais ceux-ci pouvaient être assez bien dissimulés.

-Je vois pas à qui il pourrait appartenir, mais gardons-le. Peut-être il nous sera utile plus tard. Je l'apporterai au bureau des Aurors de Montréal demain, on verra ce qu'ils pourront nous en dire...

Avec sa baguette, elle fit apparaître un sac de plastique dans lequel elle mit le parapluie.

-On continu? C'est presque fini pour le salon, on pourra aller dans mon bureau après.

Le salon rangé, Philippe et Méridith se dirigèrent vers le bureau. En chemin, Philippe ramassa le cadre sur lequel Méridith avait mit le pied. Il vit Méridith aux bras d'un homme, ils semblaient heureux ensembles.

- C'est William je présume ? demanda-t-il à Méridith. Tu l'as revus depuis que vous êtes séparés ? Philippe sentait bien que c'était de l'histoire ancienne, mais il voulait s'en assuré.

Elle perçut un énorme pincement au creux de son estomac lorsqu'elle vit la photo que Philippe tenait.

-Oui, c'est bien lui... dit-elle d'une toute petite voix avant de prendre le cadre brisé dans ses mains.

Une énorme zébrure séparait les anciens fiancés qu'avaient formés William et Méridith. Un signe peut-être? Que tout était maintenant bien terminé?

-Non, je ne l'ai pas revu, répondit-elle changeant de direction pour aller à la cuisine. Tu as soif? Moi j'ai soif...

Il restait peu de chose dans le réfrigérateur, mais il restait des bouteilles de bièraubeure. Elle en sortit deux, en offrit une à Philippe et sans plus de cérémonie en bu une grande gorgée à même la bouteille.

-Ça fait tellement bizarre de revoir cette photo. Je ne me souvenais pas en avoir laissé une ici.

Elle posa une dernière fois les yeux sur la photo puis la jeta aux ordures.

-Non pas que j'aurais pas voulu le revoir... ajouta-t-elle tristement, mais il a simplement disparu. Sa fille... sa charmante fille! Elle était très possessive. Elle n'a jamais accepté qu'il sorte avec moi. C'était mon patron. Le chef des Aurors. On s'est rencontré pendant une attaque plutôt agressive!

Elle sourit. Méridith se rappela l'épisode. Dieter avait été enfermé dans une bulle magique codée et inattaquable qui, à chaque fois qu'on essayait une série de chiffres erronés, lançait des sorts épouvantablement destructeurs. C'est ainsi qu'une quinzaine de piques d'acier l'avait transpercée un peu partout sur le corp. William, qui était arrivé sur les lieux presque en dernier, avait dû ramasser les innombrables blessés, dont Méridith qui s'était carrément évanouie dans ses bras. Les Mangemorts n'avaient jamais manqué s'imagination pour causer des problèmes aux Aurors. Méridith n'avait jamais vraiment compris pourquoi la lettre qui l'avertissait que Dieter était en péril lui avait été adressée à elle et personne d'autre chez les Aurors. Cela avait toujours été un mystère pour elle...

-Après cette enquête, on s'est rapproché lui et moi. Au début, on gardait ça secret. Tu comprends, mon patron! Plus âgé que moi en plus... Mais le monde commençait à jaser au bureau. On a fini par sortir de notre cachette.

Elle marqua une pause. Ils avaient passé des moments tellement agréables et magiques ensemble... Elle hocha tristement la tête.

-Un soir, William a voulu me présenter à sa fille et lui annoncer qu'on était fiancés. J'ai eu un choc d'apprendre qu'elle avait à peu près le même âge que moi. Un peu plus jeune quand même. Mais bon, pour moi, ça ne changeait rien. Je l'aimais. De son côté, elle, c'était différent. Elle m'a persécuté pendant plusieurs semaines. Le mariage était prévu pour le mois de décembre. Quelques jours avant Noël.

Elle regarda à l'extérieur. Elle se souvenait que trop bien de la jolie neige qui était tombée sur Londres la journée que William avait disparu...

-Le jour de ma fête, j'ai reçu une lettre. Une lettre confuse et étrange. William me disait qu'il avait appris ce que sa fille m'avait fait et qu'il était furieux. Il disait aussi qu'elle l'avait mené en bateau sur un truc qu'il n'a pas voulu me dire. Je n'ai jamais su ce que c'était. Il m'a aussi dit que sa fille était en grave danger. Que sa vie à elle, la sienne et la mienne était en danger. Qu'il devait partir. Sur le champ et ne jamais revenir...

Les poings de Méridith se crispèrent. C'était la deuxième fois, en quelques mois, qu'elle recevait une lettre du genre. La première, celle d'Aconit, le Mangemort qui s'était épris d'elle malgré lui, expliquait à Méridith comment il avait dû choisir entre elle et son clan. Cela l'avait rendue furieuse. Et de se faire faire le coup une deuxième fois l'avait rendue presque folle! Méridith s'était renfermée sur elle. Ne parlait presque plus à personne. Négligeait ses enquêtes et son Jean-Jules. Elle dormait tout le temps... jusqu'à ce qu'elle comprenne que ce n'était pas que la rupture d'avec William qui l'avait rendue dépressive.

-Il... il n'a jamais su dans quel état il m'avait abandonnée... dit Méridith tristement, les larmes lui montant aux yeux.

Méridith essuya rageusement ses larmes, comme si celles-ci avaient été représentatives d'une quelconque faiblesse qu'elle ne voulait plus montrer à Philippe. Elle l'avait fait trop souvent depuis leur rencontre.

-Je ne sais pas pourquoi je te raconte tout ça! lança-t-elle en riant. En fait, je l'ai jamais dit à personne... personne autour de moi n'a jamais su que... enfin, tu comprends?
Méridith ne savait pas pourquoi elle ressentait le besoin de le dire à Philippe, mais elle brûlait qu'il le sache. Elle se consumait sur place d'envie de partager avec quelqu'un son lourd secret. Le secret qu'elle avait trainé trop longtemps avec elle en silence... En même temps, elle était incapable de prononcer les mots. Comme si, en l'évoquant, la perte de son petit bébé deviendrait trop réelle. Elle posa une main sur son ventre vide.

Philippe écouta l'histoire de Méridith avec attention. Les blessures qu'on lui avait infligées semblaient encore douloureuses.

Malgré tout, il se risqua à poser une question : "Qu'est-il arrivé à ton bébé ?"

Méridith explosa en sanglot en entendant le mot ''bébé''. Il était le premier à le savoir... donc, il était forcément le premier à prononcer le mot et lui demander ce qui lui était arrivé. Ses larmes coulèrent à flot, mais ce n'était pas que des larmes de tristesse. Non... c'était plus complexe que cela. Méridith pleurait la perte d'un être cher, la perte de son rêve... mais aussi, elle pleurait son coulagement. Enfin, elle n'était plus seule avec ce secret. Enfin, le poids de ses épreuves commençait à lui peser un peu moins. C'était comme crever un absès. C'était douloureux, mais nécessaire. C'était un incontournable. Mais en plus, et surtout, c'était le premier pas vers une guérison.

Elle se resaisit au bout de quelques minutes seulement. Le barage qui avait cédé s'était tout de même vider rapidement. Elle releva la tête et fit un grand sourire à Philippe.

-Je suis désolée, mais il fallait que ça sorte!

Elle prit un mouchoir et reprit contenance.

-Je l'ai perdu, lui aussi. Quand j'ai appris que j'étais enceinte, j'ai été boulversée. Ça été tout un choc. J'ai songé à l'avortement... je venais tout juste de perdre mon fiancé, je vivais seule et d'un métier extrêmement dangereux. Élever un enfant seule était une grave décision. Mais je n'ai même pas eu le temps d'y réfléchir... La nature a fait son oeuvre comme qui dirait.

Elle grimaça suite à cette affirmation. Ce n'était pas la nature qui avait fait son oeuvre, et elle le savait.

-Une nuit, je me suis réveillée en sursaut. Mon lit était plein de sang et j'avais horriblement mal au ventre. Je me suis rendue à Ste-Mangouste et il m'ont appris que je faisais une fausse couche.

Elle bu une lampée de Bierraubeure avant de poursuivre.

-Ont m'a fait des analyses et ils en sont venu à la conclusion que la fausse couche n'avait pas été naturelle. Elle avait été provoquée en fait, par un poison. Un poison très puissant.

Philippe était boulversé en entendant l'histoire de Méridith. Comment son fiancé avait-il pu coupé les ponts si brusquement avec elle. Et le bébé qu'elle attendait, qui avait bien pu vouloir sa mort.

- As-tu cherché à retrouvé William après ces évènements pour lui dire à propos du bébé ? Et as-tu su qui t'avait empoisonné ?

Philippe cherchait à comprendre en posant ces questions, mais l'important, pensa-t-il c'est d'être aux côtés de Méridith et de la soutenir du mieux qu'il pouvait.

Méridith hocha la tête lentement.

-Non, je n'ai jamais cherché à le revoir. Sur le coup, oui, quand j'ai reçu la lettre, je me suis rendue chez lui. Mais il était déjà parti. Sa maison était vide. Quand je suis arrivée au bureau, on m'a dit que William avait donné sa démission. Évidemment, tout le monde s'est mis à me questionner. Qu'est-ce qui était arrivé, pouquoi s'enfuyait-il... tu vois le genre. Je n'avais pas de réponse. Et je n'étais pas certaine d'en vouloir. Il m'avait tant blessée.

Elle prit une pause et se demanda comment elle avait pu rester sur sa décision et ne pas le rechercher. Même quand elle avait appris qu'elle était enceinte, elle n'a même pas pensé une minute à le lui dire. Jamais. Pourquoi? Elle ne le savait pas. C'était comme un blocage. Comme si, quelque part, elle avait voulu le punir de l'avoir abandonné. Elle l'imaginait revenir un jour et apprendre qu'il avait manqué toutes ces années de son propre enfant...

-Pour ce qui est de savoir qui m'avait empoisonné, je n'ai jamais eu de certitudes, mais... la seule chose que je peux te dire c’est que la fille de William travaillait chez un apothicaire. Ça en dit long. Si c'est bien elle, je n'ai jamais compris comment elle avait bien pu apprendre pour ma grossesse et comment elle avait pu m'empoisonner. Lorsque William est disparu, elle a disparu avec lui!

Elle s'arrêta et prit place sur l'un des tabourets du comptoir-lunch de la cuisine. Elle s'accouda sur celui-ci, se pinçant la lèvre comme elle le faisait si souvent quand elle réfléchissait sur l'une de ses enquêtes.

-Mais tu sais quoi, j'ai toujours eu des doutes sur la fille de William. Jamais rien de précis, mais je sais pas... comme un feeling. Elle avait quelque chose de noir dans les yeux. Tu vois ce que je veux dire? Pour William, sa fille était la 8e merveille du monde et, même s'il était un Auror ultra performant, il n'a jamais vu ce que moi, j'avais vu dans le regard de sa fille. Qui sait, c'était peut-être une Mangemort!

Méridith était bien placée pour savoir que rien ne pouvait arrêter les Mangemorts quand il s'agissait de cacher leur véritable identité! Ils menaient tous une double vie. Pour ce qu'elle en savait, tous les paliers du Ministère et même de Ste-Mangouste pouvaient être infiltrés!

-Elle avait peut-être ses entrées à Ste-Magouste et a su pour ma grossesse... et a voulu éliminer un rival.

Tout cela, Méridith y avait déjà beaucoup réfléchi et c'était probablement ce qui s’était produit pour vrai. William était très riche et sa fille avait déjà mis en garde Méridith sur le fait que, mariée ou pas, elle ne mettrait jamais la main sur sa fortune. Qu'elle lui appartenait à elle et personne d'autre! Il était tout à fait plausible qu'elle ait voulu éliminer la compétition que représentait le bébé de Méridith...

-J'ai toujours eu de sérieux doutes sur la directrice de Ste-Mangouste de l'époque: Stephanie Stevens... Elle n'était pas claire cette fille-là. Elle aurait certainement pu en informer les Mangemorts si toutefois la fille de William en faisait bel et bien partie! Enfin bref, dit-elle pour changer de sujet, il faudra bien que je mette tout ça derrière moi si je veux avancer dans la vie, hein?

Elle essuya une dernière fois les yeux avec son mouchoir puis secoua la tête, comme pour chasser toutes ces mauvaises vibrations autour d'elle.

-Et toi? demanda-t-elle, curieuse, t'as une petite amie qui te torture?

Alors que Méridith amorçait son histoire, Philippe approcha un tabouret pour s'asseoir auprès d'elle. Il écouta attentivement, ponctuant son récit de hum hum, de honnnn et de ha! c'est pas vrai? Il n'en revenait tout simplement pas qu'un être humain soit capable de tant de cruauté. La fille William semblait folle à lier. Il s'approcha un peu plus et son coude effleura celui de Méridith qui poursuivait son histoire.

-Tu as probablement raison... mais ce deuil t'auras très certainement rendue plus forte, dit-il en lui replaçant délicatement l'une de ses mèches rebelles derrière l'oreille.

Philippe n'avait d'yeux que pour elle. Cette femme si forte et fragile à la fois. Il essuya doucement une larme sur sa joue parsemée de taches de rousseur et posa ses lèvres sur les siennes. Ce baiser, espéra-t-il, lui ferait oublier ce William de malheur!

Lorsque Méridith changea de sujet, il se rendit compte qu'il était peut-être allé trop vite.

-Non, répondit-il en riant à la question de Méridith. Quelques histoires banales dans le passé, mais rien de sérieux. Mes études prenaient tellement de place dans ma vie...

Il calla sa Bièreaubeurre et s'exclama:

-Bon, on retourne au travail?

Alors que Philippe s'était approché d'elle pour lui caresser les cheveux et essuyer ses larmes, Méridith y avait vu une simple marque d'amitié. Mais lorsqu'il s'était doucement approché d'elle pour l'embrasser, son coeur s'était emballé. C'était comme si elle le voyait pour la première fois. Il était si séduisant, avec sa barbe naissante et ses cheveux légèrement en bataille...

Son corps tout entier s'était enflammé lorsqu'il avait posé ses lèvres contre les siennes.

''non! avait-elle pensé... non... je peux pas, c'est trop vite!''

La confusion s'était aussitôt mise de la partie. Comment pouvait-elle tomber amoureuse si rapidement. Cela ne lui avait-il pas joué des tours par le passé. Ne s'était-elle pas embarquée trop vite avec William? Non, il fallait mettre un frein à tout cela.

Elle s'était dégagée de Philippe rapidement pour changer de sujet, reportant l'attention sur lui. Ainsi, était-il libre lui aussi...

-Euh... non, en fait, je commence à être fatiguée, répondit-elle à Philippe lorsque celui-ci l'avait invitée à poursuivre le ménage de la maison. Je préfèrerais me coucher. Si ça ne te dérange pas.

Elle plongea ses yeux dans ceux de Philippe. Comme ils étaient beaux! Comme il était bon de s'y perdre...

''Non! s'emporta-t-elle en pensée, tu le connais à peine! Tu travailles avec lui sur une enquête. Pour le remercier de t'avoir sauvé la vie. C'est tout!''

-Il y a une chambre d'ami à l'étage. C'est la chambre bleue, tout de suite à droite en montant. Il y a sûrement des serviettes et des débarbouillettes dans la penderie si tu veux te doucher. Moi, je vais y aller...

C'est à regret que Méridith quitta la cuisine pour se mettre au lit, directement, sans prendre la peine de se débarbouiller ni même se changer. Elle était si mélangée... si confuse. C'est en songeant à tous les événements de la journée qu'elle sombra dans un sommeil profond, où elle rêva de Philippe, de parapluie à manche de canard et d'ombre s'enfuyant par une fenêtre.


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